OÙ EN EST-ON ? (Un rapide point technique)

Cette semaine, back to the future ; et rapide point technique, adapté aux moins cyberpunks d’entre vous.

Stoppons donc brièvement la chronologie de notre tournage, et répondons (j’aime bien parler à la première personne du pluriel)(ça donne de la majesté) aux questions, fort pertinentes, que l’on nous a posées à moult reprises aux cours des derniers jours :

Ha, ben vous voilà de retour ! Alors, on le voit quand, ce film ? À Noël ?

Excellente question. Malheureusement, la postproduction d’un long-métrage est toujours autrement plus longue que son tournage. Alors certes, on peut tourner un film en trois semaines, mais la suite prend du temps (surtout, bien évidemment, lorsque thunes et équipiers se font rares) ; bah, je ne vais pas me la jouer Terrence Malick non plus, hein (Malick qui tourne en 2008 pour achever son montage en 2011), mais il vous faut savoir qu’un certain nombre de matches nous attendent avant de fouler la terre battue du court Philippe Chatrier :

la préparation au montage (j’y reviens ci-dessous) ; le montage image –ou l’art d’assembler les prises, couper, coller ; bricoler, quoi… et rattraper, ma foi, tout ce qui ne marche pas ; la composition de la musique originale –à laquelle travaillent, main dans la main, compositeur, monteur et réalisateur ; le montage son et les bruitages –création et re-création des atmosphères, corrections et mise à niveau des diverses prises son, pré-mixage ; le mixage (en studio) –mise aux normes ciné et TV des pistes audio ; les effets spéciaux ; la conformation du film (voir ci-dessous), suivie de son étalonnage –harmonisation des teintes et des contrastes, cachet plastique final de l’œuvre ; ainsi que la création finale de copies d’exploitation (DCPs, Blurays et DVDs).

Et encore. Je ne parle là que de technique pure –je m’étendrai vraisemblablement dans quelque futur post sur la nécessité de trouver un distributeur en parallèle à ces opérations, sur l’aval de l’État (via le CNC) et son rôle dans la diffusion du film… de même que sur un paquet de  joyeusetés annexes. Bref.

On n'est pas rendus...

On n’est pas rendus…

Autant d’étapes qui prennent du temps… M’enfin. Vu d’ici, et de tête, le film devrait être prêt pour la rentrée 2014. Dans un an, quoi. Ne vous découragez cependant pas : rien que de très normal à ça ; et croyez bien que je ferai en sorte d’enchaîner les étapes à bon rythme, pas de repos avant que ce film ne soit achevé ! Stamina, stamina. C’est après tout comme ça que l’on gagne l’US Open, s’pas ?

Et sinon, le montage avance ? Tu fais quoi, là ?

Hé bien, en fait, j’en suis encore à préparer le montage.

Pour faire court, nous avons véritablement achevé le tournage du film en juillet (shootant une soirée dans un appartement du 16e, et  une matinée chez nos amies les Vertugadins), suite à quoi Romain, notre incroyable ingénieur son, a dû renommer ses 3000 fichiers audio (!) (souvent doubles, avec ça), pendant que je compilais de mon côté les rushes ‘éclatés’ par notre caméra (ce gros malin de 1DC créant un nouveau fichier pour chaque minute de film enregistrée –soit 5 fichiers différents pour une unique prise de 5 minutes). Facilement deux grosses semaines de taf pour tout ça, yay.

Puis. En août, nous nous attaquions aux proxies (la déclinaison ‘simple Full HD’ des rushes 4k, grâce à laquelle je peux aujourd’hui monter en offline).

Traduction express, en mode ‘la technique pour les nuls’, de cette dernière phrase : nous avons travaillé avec des images de très grande taille (images beaucoup plus grandes que des images ‘haute définition’ traditionnelles) ; cool. Sauf que voilà, lesdites grandes images pèsent, du coup, très lourd, et la plupart des ordinateurs (dont le mien) galèrent à les animer. D’où la création d’images équivalentes mais compressées (copies de qualité, taille et poids réduits), les proxies, à partir desquelles sera effectué le montage –montage dit offline ; ces copies compressées, une fois montées, partiront au final pour conformation, processus inverse au précédent, permettant de rendre aux images, à partir des fichiers initiaux, leurs taille et poids d’origine.

Image 4k et son proxy

Image 4k et son proxy

Ces proxies, donc, aimablement codés par le souriant Steven, notre futur étalonneur, se sont avérés les pires des emmerdeurs : entre la compression native problématique de la caméra (MJpeg, franchement) et les problèmes de compatibilité habituels Mac/PC, puis Avid (logiciel de montage)/Resolve (logiciel d’étalonnage et de ‘proxisation’), auxquels je rajouterai la nécessité de gonfler mon ordi maison (second écran, ports USB3…), la majeure partie du mois de juillet a disparu dans les calculs et les barres de chargement.

(Nous galérions en outre, et en parallèle, à trouver une boîte capable de sauver deux cartes flash défectueuses –et les rushes perdus sur celles-ci ; mais ça, j’y reviendrai.)

Et voici donc que nous sommes, déjà, en septembre ; tous nos rushes sont enfin digérés par mon logiciel (il nous aura fallu deux versions différentes des proxies, plus un certain nombre de combines peu orthodoxes), les sons itou, et les séquences ‘perdues’ semblent sur le point d’être retrouvées. Bref, tout semble rouler ; aussi ai-je entamé, il y a deux jours, la synchro images/sons.

OK, cool. Mais, heu, cette synchro, là, c’est quoi au juste?

[La technique pour les nuls, bis :] La synchro images/sons consiste à recoller le son d’une prise donnée (par exemple, « Séquence 4, plan 2, prise 3 ») sur les images correspondantes (les images de la séquence-4-plan-2-prise-3, dans ce cas précis). Aussi bête que ça.

Pour ce faire, on utilise le clap –ce mystérieux objet que tout le monde connaît, mais dont nul ne sait vraiment à quoi il est utile…

Le clap, meilleur ennemi du monteur

Le clap, meilleur ennemi du monteur (images non étalonnées issues des… proxies [bravo dans le fond!])

Cela étant, et si la synchronisation paraît aisée en théorie, elle peut très rapidement devenir problématique, voire méchamment chronophage, dans la pratique –entre le clap qui prend son temps pour arriver (Moteur! Ça tourne… Annonce– Ho tiens, un avion! Et– Quoi? On voit le quatre-quarts dans le champ [authentique]? Mais– C’est quoi, cette ombre? Et ça, là? etc), les claps de fin, les numérotations floues ou inexactes, les oublis de clap [cf. image ci-dessus], les ennemis sont légion… Notons d’ailleurs  au passage que nous n’avions ni scripte ni clapman sur notre plateau, hein, Jean-Fred, Sarah, Claire et Ben se succédant face caméra avant chaque prise (meilleur clapman parmi les zouaves précités : Ben ; bravo à lui).

Eeeet oualà. Où nous en sommes à l’heure actuelle, en cette mi-septembre 2013.

Me voici donc parti, selon les estimations rieuses d’un pote assistant monteur (merci Romaric!) et les miennes propres, pour deux, mettons trois bonnes semaines de synchro –et de clics souris. Mais je ne me plains pas. Tout cela reste en effet infiniment plus confortable qu’un tournage dans les Highlands, voyez-vous…

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